dimanche 28 décembre 2014

Chronique violette fable noire


Eraserhead, David Lynch



Sur un coussin m’a rapporté un jour

l’homme qui fit le monde à son image

Ses yeux brillaient la désespérance

l’âme des gueux leur orgueil

& la cruauté des princes

Sur son front maniaque

faux sage faux hongre faux hommasse

et les rides craquelées la tête comme un œuf

parlant de liberté

 

Il disait Regarde je ne vois pas de différence

même les femmes ont une âme

et leur bouche pareille à la nôtre

s’embrassent parasite

nous n’aurons plus de guerre

n’ayant plus de faiblesse

Il disait Écoute comme nos voix se ressemblent

serions-nous frères ou sœurs

deux morceaux d’un même nœud

louchent un espoir à vue maintenant

nous n’aurons plus d’ombre

n’ayant plus de midi

Il chantait Mange c’est la fin des temps

rien ne compte

dehors le monde clôt ses yeux et attend le désert

la longue marche du néant et les astuces pour survivre

dehors le monde s’abîme devant notre hampe

 

 

Sur un coussin m’a rapporté un jour

la plaie simiesque d’une courtisane

Ses pupilles roulaient rondes et romances

des passions mal éteintes mal embrasées

Elle disait Regarde elle disait Écoute elle disait Chante

m’interrogeant chaque fois sous son masque

traînant sa honte la perdant dans mes bras

ayant chaud ou froid serrant relâchant l’étreinte

et sa voix mâchait ses regrets mort-nés :

« Léon disait-elle permets que je t’appelle Léon

Nous devrons nous aimer Léon le sais-tu ?

Rétracte l’instant dans mes bras Léon

comme à jamais la première fois

Chante désir et chante désirade

crie oui quand je dis non crie non quand je dis oui

cherche le moyen de me prendre

trouve le moyen de me perdre

Ma coulpe pleine une croupe à la main

Lorsque je t’en voudrai

puisque je t’en voudrai

d’un baiser absous mon front vieilli d’enfant tard

et laisse mes pleurs faner ta jeunesse. »

 

Le monde change

le monde ne change pas

Le monde change 

le monde ne change pas 

La vieille chronique du troubadour

tue chaque heure

le fou sous les coups d’un roi 

ou le poison d'une appareilleuse

À deux pas d’une cour 

une maison de plaisir

le cœur lâche



Sur un coussin m’a rapporté un jour

l’homme qui fit le monde à son image

 

 

 

 

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