jeudi 22 décembre 2011

Première intervention - Variation 2



                                                          After hours, Martin Scorcese





/Reprenons notre histoire au début, voulez-vous ?
− Clampage du cordon

//Reprenons notre histoire au début, voulez-vous ?

Nous sommes à ce moment du cut ou cusp, là, là, là, là, là,
                                                                              
 une infirmière, le ciseau de la Parque.

nous n’avons  jamais  quitté le ciseau le premier  le ciseau nous n’avons  jamais quitté le
ciseau  n’avons  jamais quitté le  premier  jamais  nous n’avons jamais le ciseau quitté le
avons le ciseau quitté  jamais nous premier le ciseau jamais avons-nous jamais  avons le
nous n’avons jamais quitté le

CRI PRIMAL


Ciseau droit coupant sécant, déchirure et cri, le vertige prend, la corde pend, l’ombilic, l’il ou l’île, forme ou chréode, anomalie, figure, visage ou dieu, anomalie face à  l’Ouvert.
                                                                            
                       
L’ombilic
ment


L’ombilic
pend



La mère et l’enfant qui la couve,
l’il ou l’image du dieu, au fond de la coupe,                                      
s’abîme.
  
Vertige prend alors l’il,
l’instant où l’Ouvert passe,
dilate et brûle la forme humaine,

puis la mère…

                                             sort de l’il…
                                      sort l’enfant…
chante la mère.


L’histoire est connue et  rabâchée depuis la nuit des temps, mais certains s’en sortent, courent plus  vite.


Le schéma de la fronce, mis sur ce blog à la date du 26 juillet 2011, devrait être repris et corrigé, ici.
Il faudrait même enlever le texte du 26 juillet 2011 et tout recommencer, ici.
En réalité, le . catastrophe de la fronce indique
le passage d’un plan à un autre, après la coupure du cordon ombilicale par l’infirmière.


Comme nous l’avons vu, l’enfant et la mère ne forment plus, après la "mise au monde", une entité à part entière, mais deux individualités, deux formes distinctes l’une de l’autre.

CEPENDANT,

pour que le schéma dynamique de la fronce soit dessiné dans sa totalité,
il faut que la mère et l’enfant reviennent à leur plan initial et fusionnel :

le nourrisson grandissant, devenant adulte, est, en l’occurrence, condamné à chanter et à aimer sa mère et sa mère est condamnée à chanter et à aimer son enfant.

Dès lors,

                                             L’enfant, s’il est un homme, s’abîmera, par la suite, dans les bras d’une femme.
                                             L’enfant, s’il est une femme, s’abîmera, par la suite, dans les bras d’un homme.


Faire ici un schéma dynamique pour [Mère sort de l’il… sort l’enfant… chante la mère]

Nous pouvons modéliser l’image, en faire pour vous une vidéo ou un film sur



               1 – Homme s’abîmant dans les bras d’une femme après sa sortie de la matrice.
                                             2 – Femme s’abîmant dans les bras d’un homme après sa sortie de la matrice.

Dans, les deux cas, un nourrisson sortant des ventres de femmes, au début.
Toujours un nourrisson, au début, sortant des ventres de femmes.


*


Une ligne passe, maintenant, les hommes poussent dessus, ordonnés, sur un axe.

Avec le DCP vient l’assurance de copies identiques d’une projection à l’autre.

Un homme marche, s’arrête à une femme qu’il pénètre, puis la femme met au monde un enfant qui grandit et devient lui-même homme ou femme.

Le même module répété chaque fois, après cela, formant cycle, sur un plan lisse : l’homme marche, s’arrête à une femme qu’il pénètre, etc. - l’homme marche, s’arrête à une femme qu’il pénètre, etc. - l’homme marche, s’arrête à une femme qu’il pénètre, etc. - l’homme marche, s’arrête à une femme qu’il pénètre, etc…

Le même module, toujours, jusqu’à l’extinction de l’espèce, à quelques encablures de nous.

Et, derrière un tel panoramique essayant d’épuiser les motifs que se donne l’espèce humaine à vouloir se dire, cette idée que, avec la mise au monde, il y a un saut d’un plan à un autre, que, chaque fois, la mère et l’enfant sont un seul et même être appelé Androgyne, Corps glorieux, Sphère ou Cellule.

Or, l’enfant et sa mère commettent une faute au début, une faute dont on ignore tout, semble-t-il, au début, et qui les fera mourir à eux-mêmes, jusqu’à ce que, par le chant et l’amour, ils se retrouvent.


Toujours, ce saut, sur la fronce, d’un plan à un autre, puis retour à la case départ, au giron, par le chant et l’amour. Toujours ce retour au chant orphique, à Orphée, se répétant comme un larsen en musique, un larsen ou un arc électrique.

Mais, 

nous pouvons, si on le souhaite, changer le lieu même que les hommes ont de se dire, nous pouvons changer du tout au tout leur façon de se représenter la vie, en passant de la catastrophe de la fronce à celles du pli, ou de celle du papillon à la queue d’aronde et, enfin, à l’ombilic. 
− O mathématiques sévères, chantait en son temps Maldoror, je ne vous ai pas oubliées, depuis que vos vivantes leçons, plus douces que le miel, filtrèrent dans mon cœur, comme une onde rafraîchissante. 
− O mathématiques sévères. O l’ombilic ! 

Nous pouvons donc utiliser, à ce propos, les sept catastrophes élémentaires du mathématicien René Thom et montrer ce qu’ont de relatif nos discours sur l’homme et l’impossibilité de les fixer dans une forme initiale ou un archétype.   

Ainsi, si nous choisissons de représenter la mise au monde par la catastrophe de l’ombilic, le ventre rond et enceint de la mère devient un lieu de densité accrue qui plonge le fœtus dans des volumes de tissus conjonctifs de plus en plus épais, au fur et à mesure de son développement. Il faudra donc que le fœtus, à neuf mois, perce le placenta qui lui tenait lieu de protection, avant que celui-ci ne l’étouffe.

Avec la catastrophe de l’ombilic, il n’y a plus de retour à un état initial, comme pour la catastrophe de la fronce, mais, au contraire, une fuite en avant, l’échappée belle du nourrisson qui, tête baissée, se retrouve effilé sous le bassin et les cuisses de sa mère, projeté hors d’elle, évacué, vidé du bain primordial, lancé hors du giron, du foyer, des pénates, des cuisses et des jupes des femmes, lancé et fuyant hors du monde  fuyant hors du monde,  lancé hors du monde, − à jamais !




La vie du nourrisson ne tourne plus autour d’un même motif, comme pour la catastrophe de la fronce, mais son métabolisme bondit pour s’affranchir de la menace d’un affaissement des parties intimes de sa mère. Comme un savon, il jaillit hors de la main des dieux, expulsé, honteux et la queue entre les jambes, mais vivant, tel le vaisseau d’Ulysse quittant l’île des Lestrygons et jaillissant hors de la baie où des géants tuaient ses hommes. Ulysse, paniqué, coupe alors les amarres qui le retenaient à la terre et il s’enfuit sur la mer, loin de l’île, en laissant lâchement ses hommes se faire égorger par les Lestrygons ! − La même forme ombilicale se retrouve aussi dans La nuit des morts-vivants ou à la fin de Braindead, comme dans nombre de films d’horreur.

Les Lestrygons, les zombies, les ventres des mères : la même forme.

La mère n’est plus une partie de la chair de son enfant, elle n’est plus le corps perdu que l’on quête, sa vie durant, mais une menace de mort, la prison qui s’écroule sous le damné, lors d’un tremblement de terre, et dont il tente de s’échapper, ou, pour le marin, la crête des vagues engouffrant les navires, lors d'une tempête.

De façon analogue, le ventre enceint de la mère mime l’histoire d’Ulysse sauvant ses compagnons des envoûtements de la magicienne Circé sur l’île d’Ééa, mais aussi le comportement amoureux des femmes, dans les romans de Kafka, et qui font payer à K l’amour qu’elles lui donnent au prix fort.

Les Lestrygons, les zombies, les ventres des mères, la magicienne Circé, les femmes dans les romans de Kafka : la même forme ombilicale, toujours.

Le ventre enceint mime, enfin, l’histoire de Paul Hackett, ce jeune informaticien new yorkais habitant l’Upper west side, dans le film After hours de Martin Scorcese.

Paul Hackett, invité par Rosanna Arquette à venir chez elle dans un loft de Soho, panique, lorsqu’il se retrouve au lit avec elle, et il fuit Arquette − Hackett fuit donc Arquette pour passer de femme en femme et d’appartement en appartement, à Soho, le quartier arty de N.Y.

Les Lestrygons, les zombies, les ventres des mères, la magicienne Circé, les femmes dans les romans de Kafka ou Rosanna Arquette pour Hackett : la même forme, toujours la même forme.

Hackett, chez Arquette, prend peur à cause d’un détail réfracté sur l’ensemble du film de Scorcese, After hours, un détail, une hantise qui prendra le pas sur sa vie, sa soirée durant à Soho : le graffiti d’un sexe d’homme mordu par les dents d’un requin, graffiti que Hackett n’a qu’entr’apperçu dans des toilettes publiques : un sexe d’homme qui n’en finira pas, pour lui, d’être mordu jusqu’à la fin de sa soirée. Un sexe d’homme sous les dents d'un requin.

Le graffiti d’un sexe d’homme mordu par un requin devient Paul Hackett et il cherche à se justifier chaque fois, chez l’une ou chez l’autre des femmes rencontrées dans le quartier de Soho, il leur demande chaque fois de pouvoir rentrer chez lui, mais elles ne le comprennent pas ; il cherche donc à les fuir toutes jusqu’à ce qu’il se retrouve, au terme de sa soirée, enfermé littéralement, par l’une d’entre elles, dans une statue faite en papier mâché, une statue bientôt volée, comme une œuvre d’art, par des cambrioleurs, et déposée par eux dans une camionnette qui roulera à tombeau ouvert jusqu’à l’Upper street, le quartier des affaires de New York.

Rosanna Arquette est le graffiti d’un sexe d’homme mordu par un requin.

Dans un virage, les portes de la camionnette s’ouvrent et la statue de Hackett tombera sur le carreau. Elle se brise à huit heures du matin sur le trottoir, à l’ouverture des portes du bureau où le geek Hackett travaille chaque jour.

La statue de Hackett se brise chaque jour à huit heures du matin.

La statue de Hackett ou K ou Arquette.

Rosanna Arquette est le graffiti d’un sexe d’homme mordu par un requin.

Chaque jour, à huit heures du matin, la statue de Hackett ou K fuit Arquette à l’ouverture des portes du bureau.

Hackett, ou K, ou Arquette, ou vous-même.
  
Chaque jour, à huit heures du matin.

Chaque jour, Rosanna Arquette...




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